Les affaires du mois N°25 Avril 2019

Décision de justice
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Affaire N°1 : Une association peut-elle déduire de la TVA collectée les frais d'hébergement de ses bénévoles participant à l'organisation d'une manifestation ? Affaire N°2 : Un maire commet-il une erreur manifeste d’appréciation en refusant un permis de démolir alors que le propriétaire du bâtiment en ruine ne dispose pas des moyens financiers pour engager des travaux de rénovation et de restauration onéreux ? Affaire N°3 : La présence d'un enfant français en France né à l'étranger et y ayant vécu suffit-elle à le faire considérer au sens des dispositions de l'article L. 313-11-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile comme y résidant ?

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Affaire n°1 requête 1603779

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L’association Chantilly, association à but non lucratif, organise chaque année à Chantilly des concours hippiques.  Soumise à la taxe sur la valeur ajoutée (TVA), elle a donc déduit de la TVA collectée sur ses ventes et prestations la TVA payée sur ses achats et dépenses réalisées.

 A l’issue de la vérification de sa comptabilité, l’administration fiscale lui a assigné, par propositions de rectification des 1er et 10 septembre 2015, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée pour la période du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2013, en refusant la déduction de la taxe grevant certains frais d’hébergement et de restauration exposés pour des bénévoles.

L’association Chantilly Jumping conteste cette analyse et demande au tribunal d’en prononcer la décharge.

Pour organiser ces concours, l’association fait appel à des bénévoles qu’elle héberge à titre gratuit. Ses bénévoles n’étant pas des salariés, l’association a considéré qu’elle pouvait déduire la taxe sur la valeur ajoutée grevant les dépenses d’hébergement des bénévoles du montant de la TVA collectée. A l’appui de ses conclusions aux fins de décharge, l’association s’appuyait sur les dispositions de l’article 206 de l’annexe II du code général des impôts ainsi que de l’interprétation donnée à cet article par l’administration fiscale dans le bulletin officiel des finances publiques.

Aux termes de l’article 206 de l’annexe II du code général des impôts, le coefficient d'admission est nul dans les cas suivants (…) : 2° Lorsque le bien ou le service est relatif à la fourniture à titre gratuit du logement des dirigeants ou du personnel de l'entreprise, à l'exception de celui du personnel de gardiennage, de sécurité ou de surveillance sur les chantiers ou dans les locaux de l'entreprise. ».

Le tribunal a jugé que par la nature et les modalités de leur collaboration à l’objet social de l’association, les bénévoles doivent être regardés, au sens de cet article, comme appartenant au personnel de l’association Chantilly Jumping, quand bien même ils n’en sont pas salariés et ne pouvaient être assimilés à des tiers. Par suite, l’association Chantilly Jumping ne pouvait pas déduire de la taxe sur la valeur ajoutée collectée la taxe sur la valeur ajoutée grevant les dépenses d’hébergement à titre gratuit des bénévoles au titre des années 2012 et 2013. Par conséquent, l’administration avait fait une exacte application des dispositions de l’article 206 de l’annexe II du code général des impôts et du §1 de la doctrine référencée BOI-TVA-DED-303-010 fixant les modalités de détermination du coefficient d’admission.

http://bofip.impots.gouv.fr/bofip/627-PGP.html?identifiant=BOI-SJ-RES-10-10-10-20130718

http://bofip.impots.gouv.fr/bofip/1190-PGP.html

Petit rappel sur la TVA :

L’entreprise qui réalise de manière habituelle des opérations économiques en Union européenne est assujettie à la Taxe sur la Valeur Ajoutée (TVA). Cette taxe est directement facturée aux clients sur les biens qu'ils consomment ou les services qu'ils utilisent. C'est à l’entreprise de la collecter sur ces opérations imposables et de la déclarer.

En contrepartie de l'obligation de collecter la TVA sur ses ventes ou prestations imposables, l’entreprise peut déduire la TVA payée sur certains achats et dépenses réalisées dans le cadre de son activité professionnelle sous certaines conditions.

L'entreprise doit alors reverser aux services des impôts la différence entre la TVA collectée sur ses ventes ou services et la TVA déductible.

 

Affaire n°2 requête 1700291-1

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Un maire commet-il une erreur manifeste d’appréciation en refusant un permis de démolir alors que le propriétaire du bâtiment en ruine ne dispose pas des moyens financiers pour engager des travaux de rénovation et de restauration onéreux ?

L’APEI des 2 vallées est propriétaire du château de Coyolles. N’ayant pas les moyens financiers de procéder aux travaux nécessaires à sa restauration, l’APEI a sollicité le 13 juin 2016 un permis de démolir ce bâtiment. Par un arrêté du 5 juillet 2016, le maire de Coyolles a rejeté cette demande. L’APEI des 2 vallées demande au tribunal d’annuler cet arrêté.

Dans sa requête, l’APEI soutenait que l’édifice, non entretenu faute de disposer des moyens financiers nécessaires à cette fin, est vétuste et présente un caractère dangereux et qu’ainsi, le maire avait commis une erreur d’appréciation au regard de l’article L. 451-1 du code de l'urbanisme.

Aux termes de l’article L. 451-1 du code de l'urbanisme : « Le permis de démolir ne peut être refusé lorsque la démolition est le seul moyen de mettre fin à la ruine de l'immeuble ».

Pour refuser de faire droit à la requête, les juges ont considéré qu’il ressort des pièces du dossier que si le plancher haut du rez-de-chaussée du bâtiment présente une flèche importante et est partiellement effondré, si des traces d’humidité ont été relevées en sous-sol et si une partie de la toiture est éventrée, les murs sont en bon état de conservation et présentent un état de solidité satisfaisant et des travaux de rénovation et d’étanchéité de la toiture sont réalisables. Par suite, l’état du bâtiment en litige n’est pas tel que sa démolition serait le seul moyen de mettre fin à sa ruine prétendue. La circonstance que ces travaux auraient un coût onéreux est sans influence sur la légalité de la décision attaquée.

Pour le tribunal, le maire de Coyolles n’a commis aucune erreur d’appréciation, au regard des dispositions précitées de l’article L. 451-1 du code de l'urbanisme, en rejetant la demande de permis de démolir présentée par l’APEI des 2 vallées.

Le tribunal a donc rejeté la requête de l’APEI des 2 vallées.

 

Affaire N°3 requête 1900409

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Mme W, ressortissante gabonaise est entrée en France le 29 septembre 2017 accompagnée de sa fille Marie-Claire, munie d’un visa de court séjour délivré par les autorités italiennes. Le 13 novembre 2018, Mme W a demandé la délivrance d’une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " en qualité de parent d’un enfant français. Par un arrêté du 6 décembre 2018, le préfet de la Somme a refusé de lui délivrer le titre de séjour demandé, l’a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Mme W demande au tribunal d’annuler cet arrêté.

A l’appui de sa requête, Mme W soutenait qu’elle remplissait les conditions requises par les dispositions du 6° de l’article L.313-11 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile dès lors que sa fille de nationalité française est en France et qu’elle contribue effectivement à son entretien et à son éducation.

Toutefois, le tribunal a jugé qu’aux termes de l’article L. 313-11, 6° du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, le législateur n’a pas requis la simple présence de l’enfant en France mais a exigé que l’enfant réside en France, c’est à dire qu’il y demeure de façon stable et durable.

En l’espèce, il ressort des pièces du dossier que la requérante et sa fille sont entrées en France le 29 septembre 2017, après avoir quitté le Gabon où elles ont toujours vécu jusqu’alors et où résident encore le père de l’enfant, ressortissant français et les grands-parents de l’enfant. Ainsi, et alors même que la requérante justifiait déjà à la date de la décision attaquée d’une présence en France de plus d’un an et de la scolarité de sa fille, Mme W n’établit pas que le centre des intérêts de son enfant s’est fixé depuis en France, pays dans lequel, à l’exception de la requérante, cet enfant ne dispose d’aucune attache familiale alors que le père de l’enfant, certes de nationalité française vit au Gabon.

Dans ces conditions, les premiers juges ont considéré que le préfet de la Somme n’a pas commis d’erreur en estimant que Mme W ne remplissait pas les conditions énoncées à l'article L.313-11, 6° du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile et refusé et en refusant, pour ce seul motif, de lui délivrer un titre de séjour. Ayant écarté les autres moyens de la requête, le tribunal a rejeté la requête de Mme W.