L’association Véloxygène avait demandé à la communauté d’agglomération d’Amiens Métropole de prévoir l’aménagement d’itinéraires cyclables dans le cadre du projet de rénovation de la rue Saint-Fuscien et de la chaussée Jules Ferry à Amiens. Le tribunal était saisi d’un recours contre le refus opposé par Amiens Métropole
Ce que prévoit la loi
L’aménagement de pistes cyclables constitue une obligation de résultat pour l’administration, dès qu’une voie est rénovée.
En revanche, la collectivité choisit, en fonction des besoins et contraintes de la circulation, l’aménagement qu’elle estime le plus adapté parmi les pistes, bandes cyclables, voies vertes, zones de rencontre ou, pour les chaussées à sens unique à une seule file, marquage au sol permettant la coexistence de la circulation des cyclistes et des véhicules automobiles. C’est ce que prévoit l’article L. 228‑2 du code de l’environnement, issu de la réforme du 24 décembre 2019 (loi d’orientation des mobilités).
Une dissociation partielle de l’itinéraire cyclable et de la voie urbaine n’est envisageable, et seulement dans une mesure limitée, que lorsque la configuration des lieux l’impose au regard des besoins et contraintes de la circulation.
Le tribunal a examiné la légalité du refus d’Amiens métropole à l’aune de ces exigences.
Tronçon nord de la rue Saint-Fuscien - partie comprise entre les boulevards extérieurs et le carrefour de la Croix rompue
Amiens Métropole n’a pas prévu d’aménagements cyclables sur l’ensemble du tracé de la voie rénovée. La collectivité, qui n’a donc pas rempli son obligation de résultat, se prévaut de la congestion du stationnement et de l’étroitesse de la voie mais ces seules circonstances ne sauraient justifier le choix de recourir à des aménagements cyclables seulement à l’approche du feu de circulation et du giratoire présents sur le tronçon. Surtout, en se contentant de se prévaloir de telles contraintes, elle ne démontre pas avoir exploré toutes les possibilités d’aménagements cyclables prévues par la loi. Enfin, l’itinéraire alternatif proposé par Amiens Métropole oblige les cyclistes à opérer un détour qui, par sa longueur, ne présente pas une mesure limitée. Le tribunal annule donc le refus d’Amiens Métropole et enjoint à la collectivité de réexaminer la demande de l’association Véloxygène en se conformant à la loi.
Chaussée Jules Ferry
Amiens Métropole n’a pas prévu d’aménagements cyclables sur l’ensemble du tracé de la voie rénovée, en mettant en avant qu’elle a institué une zone 30, ce qui n’est pas au nombre des aménagements cyclables prévus par la loi. Elle invoque encore une fois les contraintes inhérentes au stationnement et l’étroitesse de la voie mais ne démontre pas avoir examiné l’ensemble des aménagements cyclables possibles qui s’offraient à elle, se contentant d’instaurer des marquages au sol, remonte-file et sas, quelques mètres en amont des feux de signalisation. Enfin, elle ne propose aucun itinéraire alternatif pouvant être emprunté, dans une mesure limitée, par les cyclistes.
Le tribunal administratif annule là encore le refus opposé par Amiens Métropole et lui enjoint de réexaminer la demande de l’association dans un délai de quatre mois.
Après le jugement
Amiens Métropole devra donc justifier avoir étudié toutes les possibilités possibles pour mettre en place des pistes cyclables sur le tronçon nord de la rue Saint-Fuscien et sur la chaussée Jules Ferry, dans un délai de quatre mois à compter de la notification du jugement.
TA Amiens, 21 novembre 2024, Association Véloxygène, n°s 2104322 et 2104323, Inéd.
Article L. 228-2 du code de l'environnement : A l'occasion des réalisations ou des rénovations des voies urbaines, à l'exception des autoroutes et voies rapides, doivent être mis au point des itinéraires cyclables pourvus d'aménagements prenant la forme de pistes, de bandes cyclables, de voies vertes, de zones de rencontre ou, pour les chaussées à sens unique à une seule file, de marquages au sol, en fonction des besoins et contraintes de la circulation. Lorsque la réalisation ou la rénovation de voie vise à créer une voie en site propre destinée aux transports collectifs et que l'emprise disponible est insuffisante pour permettre de réaliser ces aménagements, l'obligation de mettre au point un itinéraire cyclable peut être satisfaite en autorisant les cyclistes à emprunter cette voie, sous réserve que sa largeur permette le dépassement d'un cycliste dans les conditions normales de sécurité prévues au code de la route. Le type d'aménagement de ces itinéraires cyclables doit tenir compte des orientations du plan de mobilité, lorsqu'il existe. CE, 30 novembre 2020, Commune de Batz-sur-Mer, n° 432095, aux Tables, actualisé par CAA13, 26 mai 2023, Métropole Aix Marseille Provence c/ Association « Collectif Vélos En Ville », nos 22MA02798, 22MA02798, 22MA02797 : Il résulte des dispositions de l’article L. 228-2 du code de l’environnement que l’itinéraire cyclable dont elles imposent la mise au point à l’occasion de la réalisation ou de la rénovation d’une voie urbaine doit être réalisé sur l’emprise de la voie ou le long de celle-ci, en suivant son tracé, par la création de pistes, ou bandes cyclables, de voies vertes, de zones de rencontre ou, pour les chaussées à sens unique à une seule file, d’un marquage au sol permettant la coexistence de la circulation des cyclistes et des véhicules automobiles. Une dissociation partielle de l’itinéraire cyclable et de la voie urbaine ne saurait être envisagée, dans une mesure limitée, que lorsque la configuration des lieux l’impose au regard des besoins et contraintes de la circulation. |