Par un arrêté du 15 juillet 2022, le maire de la commune de Camon a délivré à la société civile de construction vente (SCCV) La Venise verte un permis de construire un ensemble immobilier de trente et un logements près du Marais des Bœufs. A la suite du jugement du tribunal administratif d’Amiens, la société et la commune de Camon devront justifier, dans un délai de quatre mois, des mesures permettant de régulariser le permis de construire en litige
L’association pour la protection et la sauvegarde du site et de l’environnement des Hortillonnages, l’association SOS Hortillonnages pour la défense des propriétaires, le respect de la faune et de la flore du site, la lutte contre les nuisances ainsi qu’une dizaine de particuliers ont demandé au tribunal administratif d’Amiens d’annuler l’arrêté du maire de Camon autorisant la construction du projet immobilier.
Le tribunal n’a pas examiné le recours de l’association SOS Hortillonnages, dont le président n’avait pas été habilité à agir en justice. Le tribunal a également considéré que certains des particuliers ne justifiaient pas d’un intérêt à agir en justice contre le permis de construire, étant trop éloignés sur site.
Concernant la régularité de l’arrêté contesté, les juges ont estimé que le dossier de demande de permis de construire était incomplet à trois titres :
aucune photographie ne permettait au service instructeur d’apprécier l’impact visuel des constructions en direction du Marais des Bœufs,
les plans produits ne comportaient pas des cotes altimétriques conformes au plan de prévention des risques naturels applicables au terrain d’emprise,
enfin, l’attestation de l’architecte du projet qui figurait à ce dossier ne certifiait pas qu’une étude préalable satisfaisant aux exigences de ce plan de prévention avait été réalisée.
Le tribunal a également constaté que, selon les plans déposés, le coffret électrique du bâtiment C ainsi que le rez-de-jardin de ce bâtiment étaient situés 5 centimètres en-dessous du niveau minimum exigé par les dispositions du plan de prévention des risques naturels, en matière d’inondation. Il a fait le même constat concernant le rez-de-jardin du bâtiment C.
En revanche, le tribunal a écarté les autres motifs d’illégalité invoqués. Il a notamment considéré que les dispositions du règlement du plan local d’urbanisme applicables au secteur étaient bien respectées. Il a jugé également que le projet s’insérait suffisamment dans son environnement.
Tous les vices relevés étant susceptibles d’être régularisés sans remettre en cause la nature même du projet, le tribunal a sursis à statuer, comme le prévoit l’article L. 600-5-1 du code de l’urbanisme, afin qu’une régularisation puisse intervenir, dans un délai de quatre mois, par la production d’un permis de construire modificatif.
Tribunal administratif d’Amiens, 4ème chambre, n°2204047, 3 octobre 2023.
Qu’est-ce que la régularisation des autorisations d’urbanisme devant le juge administratif ? Lorsque le juge administratif estime qu’une autorisation d’urbanisme, comme un permis de construire, est entachée de vices qui l’affectent dans sa globalité mais qui peuvent être régularisés, car n’impliquant pas d’apporter au projet un bouleversement tel qu’il en changerait la nature même, il ne doit pas annuler l’acte. Il doit, après avoir invité les parties à présenter leurs observations sur une mesure de régularisation, fixer un délai pour une telle mesure et surseoir à statuer jusqu'à l'expiration de ce délai. Si une mesure de régularisation est notifiée dans ce délai au juge, celui-ci statue alors sur la demande d’annulation de l’acte après avoir invité les parties à présenter leurs observations Texte applicable : l’article L. 600-5-1 du code de l’urbanisme dispose que « (…) le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre un permis de construire, (…) estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu'un vice entraînant l'illégalité de cet acte est susceptible d'être régularisé, sursoit à statuer, après avoir invité les parties à présenter leurs observations, jusqu'à l'expiration du délai qu'il fixe pour cette régularisation, même après l'achèvement des travaux. Si une mesure de régularisation est notifiée dans ce délai au juge, celui-ci statue après avoir invité les parties à présenter leurs observations. (…) » |